Parlez-moi d'amour ..(1986)

(1938-1988)

Raymond Carver était un homme discret. Ses histoires ne racontent pas les vies de "héros" mais la vie des "gens" : Une serveuse, un chômeur, un père anxieux, une employée de bureau divorcée, des voisins trop curieux, un couple qui s'ennuie. Ses personnages peuvent être vous, moi, nos amis, notre enfant, notre famille... Mais de la banalité, il savait cerner et pointer justement, la ou les petites choses qui font qu'à un moment le personnage prend conscience de ce qui peut faire basculer son destin, que des petites choses peuvent tout changer....

En fait, il nous parle de la vie, la vraie. Tout en délicatesse, et avec précision, avec des dialogues maîtrisés à la perfection, ses personnages restent crédibles mêmes dans les situations les plus bizarres.

Il disait : "Tu n'es pas tes personnages mais tes personnages sont toi" ! (Il disait cela par le fait qu'il avait exercer multiples métiers etc...)

Raymond Carver, grand auteur de nouvelles et de poèmes était américain, c'était un homme qui aimait la discrétion mais qui avait l'art d'écrire magnifiquement !

Voilà un extrait du receuil de 17 nouvelles : Parlez-moi d'amour (1986)

"L'un et l'autre n'étaient que plâtre et bandages, des pieds à la tête. On voit ce genre de choses au cinéma. Eh bien, c'était tout à fait pareil. Des bandages avec des petits trous pour les yeux, le nez, la bouche. En outre, les jambes de la femme devaient rester en étiration. Quant au mari, il demeurait profondément déprimé. Pas à cause de l'accident, pourtant. Je veux dire : l'accident avait son importance mais il n'expliquait pas tout. Quant je me suis placé face au trou qui correspondait à sa bouche, l'homme m'a confié qu'il ne s'en faisait pas tant à cause de l'accident que parce qu'il ne pouvait pas voir sa femme par les fentes à hauteur des yeux. Il m'a dit que c'était pour cela qu'il broyait du noir. Vous vous rendez compte ? Je suis en train de vous dire que ce type avait le cœur brisé parce qu'il ne pouvait tourner sa fichue tête et voir sa fichue bonne femme."

Véronique Blandin